SVR LES LO­VANGES, MALADIE ET GVERISON, DE TRES HAVT, TRES-PVISSANT ET TRES VERTVEVX Seigneur, Messire GEORGE DE VILLIERS, Compte Marquis & Duc de Buckingham, Grand Admiral & Grand Escuyer du Roy d' Angleterre:

Ode, PAR IEAN D'ALARY Aduo­cat au Parlement de Thoulouse, Autheur de l'abregué des longues Esteudes, monstrant dans peu de temps les deux perfections du scauoir, qui consistent a discourir des plus beaux suiets, & abien coucher par escrit & a faire des Oewres, par l'inuention de son Art, qui la constrainct de quit­ter la France et ses biens, par l'Enuie et la Calumnie des Iesuites.

Ode.

COmbien que mon Art uray mesprise
Celluy des vers, comme menteur,
En relleuant mon entreprise
A former vn grand Orateur:
Buckingham, vostre renommèe
Des mains de la vertu semée,
Aux quatre endroicts de l'vniuers,
M'attire aux filles de Memoire,
Pour changer la fable des vers,
En vostre veritable gloire.
Si vostre los ne les asseure,
On les croira mal asseurès,
Pour donner des vers meseurès,
A vos merites sans meseure:
Et encore ces vers nombreux,
Ne scauroint pas comprendre en eux,
Vos Vertus sans nombre, & leur vaine,
Pour couler d'un style plus dous,
Vouldroint auoir de Melpomene,
La douceur qu'ils louënt en vous:
Mais c'esteux, qui font que nous sommes,
Pareils a la Diuinitè:
[Page 4]Et qui donnent aux plus grands hommes,
Le pris de l' Immortalitê:
Cest d'eux qu' Apollon enuironne
Les fronts, que la gloire couronne,
L'honneur est confit dans leur miel,
Ils vont annnoblissant les races,
Et coulent des graces du Ciel,
Et ceux cy du Ciel de vos graces.
La seule vertu qui rassemble,
En vous la gloire et le bonheur,
Vous acquiert beaucoup plus d'honneur,
Que ne font vos honneurs ensemble:
Ce sont des presens d'un grand Roy;
Pour le loyer de vostre Foy,
Et n'auès par ses benefices,
Tant d'honneurs en vous ramassés;
Que a [...] gloire par vos seruices,
Qu'on ne scauroit lou'r assès:
D'auoir la grace en l'ame escrite,
Et toutes les perfections,
Pour mieux posseder le merite,
C'est le but de vos actions:
Vostre Esprit ne scait faire hommage,
Qu'aux vertus, dont il est l'image,
Car vous logès, estant vainqueur,
Des passions filles du blasme,
Et l'humanité dans le coeur,
[Page 5]Et la diuinitè dans l'ame:
Vostre ame n'est rien que sagesse,
Vostre Esprit que diuinite,
Vostre coeur que benignité,
Ny vostre main rien que largesse:
Ceux qui vont goustant les douceurs,
De diuin mestier des neuf Soeurs,
Lors que leur Muse vous estraine,
Ont de vous tresor pour tresor,
Changeant leur fleuve d' Hypocrene,
En vn Pactole et fleuve d'or:
L'honneur qui de sa saincte flame,
Eprit vostre coeur genereux,
Vous a rendu l'ame de l'ame,
D'un Roy scauant & valeur eux:
Tout ce que son desir commende,
Vostre volontè le demende,
Et tous deux pour vn seul contés,
Il ne peut en ce qu'il aspire,
Desirer que vos volontès,
Car vous voulès ce qu'il desire:
C'est la fleur de vostre esperence,
C'est le fruict de vostre desir.
C'est le Ciel de vostre plaisir,
C'est l'ancre de vostre asseurence;
C'est le Temple de vos honneurs
C'est l'Estoille de vos bonheurs,
[Page 6]Cest le Soleil qui vous enflame,
Et vos yeux n'aians dautre iour,
L'amour seroit plustost sans ame,
Que vostre ame sans son amour.
Son amitié si fort empraincte
Dans vostre ame, en toute candeur,
Ne se nourrit que de la craincte,
Et du respect de sa grandeur:
Ce qui la rend plus assureé,
Car elle est si bien meseurèe,
Aux loix de la discretion,
Qu'elle n'employe sa puissence,
Auec vne humble affection,
Que pour luy rendre obeyssence.
Plusieurs ayment plus la Couronne,
Et le sceptre d'un puissant Roy,
Ayans l'ambition pour loy,
Qu'ils ne cherissent sa personne:
Vous vn Phoenix en loyauté,
N'aymés pas tant sa royauté,
Que son grand Esprit, qu'on remarque,
N'auoir iamais eu de vainqueur,
Et quand il ne seroit Monarque,
Il le seroit de vostre Coeur.
Vous ne pouués seruir le Pere,
D'un los eternel reuestu,
Sans aymer le fils, qu'on espere
[Page 7]Estre heritier de sa vertu:
Bien que vous seruiés dauantage
Le Pere, son amour partage,
L'ardent coeur de vostre amitié,
Car leurs moeurs & humeurs esgalles,
Vous en faict donner la moitié,
Ason fils, Le Prince de Galles.
C'est amour qui vous sert de vie,
Doibt durer malgré le trespas,
Estant si fort, qu'il ne doibt pas
Ceder au combat de l'enuie:
La malice auec tout son fiel,
A beau couurir ce diuin Ciel,
Des noirs nuages du mensonge,
Le iour de vostre integrité,
Les dissipe comme vn faux songe,
Des rays de de sa fidelité.
Ceux qui vouldroint de l'Angleterre,
Qui'ls redoubtent pour ses valeurs,
Croistre les bornes de leur Terre,
Qui do ibt s'acroistre vn iour des leurs:
Quoy que leur lascheté se vante,
Vostre grand Coeur les espouuente,
C'est l'ancre pour les acrocher,
Vostre prudence est leur orage,
Et vostre conseil, le rocher,
Ou ils doibuent faire naufrage.
Le venin de leur perfidie,
En infectant d'un faux rapport
Le Roy, vostre ame & cher support,
A causé vostre maladie:
Mais vous l'Astre de leur malheur,
Leur influés plus de douleur,
Car s'ils vous ont donnè la fieure,
Vostre nom honorablement,
Enfente dans ces coeurs de Lieure,
La fiebure d'un grand tremblement:
Ils craignent que leurs Tyrannies,
Ne recoiuent le frein des loix,
Des mains de vos forces vnies,
Auec l'audace des Anglois:
Qu'ils ne rendent a leurs espèes,
Les places qu'ils ont vsurpèes,
Bien que leur orgueil s'obstinat,
Du fiel de l'Iniustice mesme,
D'occuper le Palatinat,
Et le Royaume de Boheme:
Ils redoubtent que la tempeste
Du vent, que leur bouche a donné,
D'un vengeur fouldre enuironné,
Ne vienne a fondre sur leur teste:
Que ce vent guide les vaisseaux
Des Anglois, pour mettre a mourceaux
Les leurs, de leur ire allumèe,
[Page 9]Contre vn autre [...]aomedon,
Payant ce vendeur defumeé,
De l'esclat fumeux du Canon:
Vous acquerés c'est aduantage,
De ces Enuieux combatu,
Que leur hayne acroist dauantage,
L'estime de vostre vertu:
Les grandes vertus sont suiuies,
De l'ombre des grandes enuies,
Vostre los qui les faict pecher,
Faict bien cognoistre leur manie,
Mais il ne peut pas empescher,
La poison de leur Calomnie:
Ce Prince qui n'est que prudence,
Et qui pese tout sagement,
Pour ne donner son iugement,
Aux regrets de la repentence,
Cognoist bien d'un esprit royal,
Que vous luy estes tresloyal,
Et que ces Renards de cautelle,
(A fin qu'il n'en recouure vn tel)
Voudroint par leur hayne mortelle,
Perdre c'est amour immortel:
Aussy remply de fascherie,
De le croire fi hors de soy,
Qu'il creust plus a leur tromperie,
Qu'il ne croist pas a vostre foy:
[Page 10]Comme vn Astre d'heureux presage,
Il vous a veu d'un doux visage,
Qui cachoit son affliction,
Vous donnant en son dueil extréme,
La douce consolation,
Dontil auoit besoing luymésme:
O que la fiebure et la detresse,
Qui vous agitoit de ses flots,
Agita sa voix de sanglots,
Et fendit son coeur de tristesse:
Vostre mall'eust mis au Cercueil,
Et l'eust enterré dans son dueil,
N'estoit que ce diuin Monarque,
(Dont le los est au Ciel escrit,)
Est exempt des loix de la Parque,
A cause qu'il n'est rien qu'Esprit.
Vous auès treuué le remede
De vos douleurs, dans les discords,
Le bien que vostre ame possede,
Chassant le mal de vostre Corps:
Non: le Roy & vostre amour saincte,
Semble changer ce mal en faincte,
Vostre Coeur loge dans son sein,
Qui faict que le sens persuade,
Que puis que ce Prince estoit sain,
Vous ne pouuiès estre malade:
V [...]ués doncques malgré l'Enuie,
[Page 11]Auec tant de contentement,
Qu'elle ayt pour immortel tourment,
L'heur de vostre immortelle vie:
Viués pour le Roy, vostre apuy,
Qui vit en vous, et vous en luy,
Viués pour toute l'Angleterre,
Sans estre iamais abatu,
Et pour l'Honneur, qui vit en terre
Par l'ame de vostre Vertu.

Audict Seigneur SONNET.

GRand Duc, grand de fortune, et plus grand de prudēce,
Ie ne scay si ie doibs, plus louër le bonheur,
Qui vous rend reluisant de richesse et d'honneur,
Que la Vertu qui faict en vous sa residence:
Mais non: c'est la Vertu, auec plus d'euidence,
Qui vous a sagement choisi pour Gouuerneur,
Le merite infini, de vos biens le donneur,
Les vous faict meriter en plus grand' abondence:
La Fortune est meuable, et a son appetit,
Faict d'un petit vn grand, et d'un grand vn petit,
Elle ourdit le bonheur, et en coupe la trame:
Mais elle ne peut nuire a vostre iugement,
Dautant que la Vertu, qui loge dans vostre ame,
La rend constente en vous, et sans nul changement.
Fin

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